Abandonnée, Kalamazoo (Michigan) a pu rebondir
Wednesday, April 14, 2009 By New York Correspondence Caroline Talbot
"Ils avaient même laissé les tasses à café dans les armoires", se souvient Ronald Kitchens, le patron de Southwest Michigan First, l'agence de développement de la région de Kalamazoo (Michigan, 241 000 habitants). En 1999, le numéro un mondial de la construction automobile, General Motors (GM) avait pris ses cliques et ses claques, abandonnant sur place 165 presses et 4 000 emplois. Une déconvenue de plus pour Kalamazoo - cité dont le nom, d'origine indienne, signifie "là où les eaux bouillonnantes se rencontrent" - qui avait déjà perdu six papeteries, puis, dans les années 1980, le siège du légendaire fabricant de guitares Gibson transféré à Nashville (Tennessee), au plus près des stars du country. Enfin, l'entreprise vedette locale, le laboratoire pharmaceutique Upjohn, a été absorbée par Pharmacia, puis par Pfizer... qui a décidé de transférer la recherche sur un autre site : 4 000 emplois ont été condamnés. C'était en 2003. Kalamazoo filait un mauvais coton. Mais ce que M. Kitchens appelle "le capitalisme de communauté" s'est mis en route. Une douzaine de leaders locaux - industriels, médecins, héritiers de la famille Upjohn, etc. - ont décidé de financer la relance de la région, aux côtés de la ville et de l'Etat du Michigan. C'est ainsi qu'a été créé le fonds Southwest AP/Pam Shebest Quand le Michigan affiche un taux de chômage de 12 %, Kalamazoo s'en tient à 9,9 %. Les start-up de la biotechnologie font vivre 200 salariés. 2 Michigan First Life Science (SMFLS), doté de 50 millions de dollars (38 milliards d'euros) pour retenir les cerveaux de Pfizer en les aidant à monter leur société. Paul Neeb, 42 ans, résident dans l'"incubateur" du SMFLS fait partie du lot. Il va lancer sa start-up dans quelques mois. De Kalamazoo, dont il goûte la beauté des lacs en été, il apprécie aussi l'engagement de la ville à financer les études supérieures de ses trois enfants dans les universités publiques du Michigan. David Zimmermann, 51 ans, s'est lancé, lui aussi. Le nouveau patron de Kalexsyn, chercheur, qui se dit "constructeur de molécules", développe des composés pour les laboratoires pharmaceutiques. Cet ancien de Pfizer a bénéficié d'un prêt de 450 000 dollars ; ses locaux ont été subventionnés. Universitaires, avocats et experts-comptables l'ont aidé à concevoir son modèle économique. Aujourd'hui, sa PME fait vivre 22 scientifiques de haut niveau et prévoit, en 2009, un chiffre d'affaires de 5,4 millions de dollars. MIEUX QUE NEW YORK Bien sûr, quelques dizaines de postes ne remplacent pas les milliers d'emplois perdus dans l'automobile et la pharmacie. Mais les habitants de Kalamazoo relèvent peu à peu le défi. Ainsi, quand le Michigan affiche un taux de chômage de 12 %, Kalamazoo s'en tient à 9,9 %. Les start-up de la biotechnologie font vivre 200 salariés. Quant aux laboratoires vides de Pfizer, ils ont été cédés pour 1 dollar symbolique à MPI Research, spécialiste des tests précliniques (1 800 salariés), qui promet d'y employer 3 300 personnes dans les cinq ans. Le site de GM a, lui, laissé la place à des entrepôts. Un grand de l'acier, Kaiser, y investit 80 millions de dollars destinés à une nouvelle unité d'extrusion de l'aluminium pour l'industrie aérospatiale : 300 nouveaux emplois devraient être créés. Kalamazoo étend ses filets de plus en plus loin. Alon Israely, le PDG new-yorkais de Business Intelligence Associates, a vu à la télévision une réclame vantant les charmes du Michigan. Cela tombait bien : son entreprise d'avocats et d'informaticiens, experte en collecte et analyse d'informations réglementaires, cherchait où installer son nouveau centre de données et ses juristes. Le Michigan lui a fait cadeau de 2,7 millions de dollars d'impôts. Et les décideurs de Kalamazoo lui ont ouvert leur carnet d'adresses. "On m'a emmené dans le meilleur restaurant, l'université va m'envoyer des stagiaires", dit-il. Il promet de recruter dans les deux ans 300 personnes de la région. "Les salariés sont qualifiés, travaillent dur, sont honnêtes, poursuit-il. Et ils sont beaucoup moins chers qu'à New York."